Plonger dans l’instant présent est une quête universelle, une danse subtile entre le mental et l’expérience vécue. C’est une invitation à se défaire des chaînes du passé et des incertitudes du futur pour embrasser pleinement ce qui est, ici et maintenant.
Où se cache l’instant présent ? Un voyage dans le temps et l’espace
- Quand l’instant d’avant s’est-il évanoui ?
- Quand le présent a-t-il réellement pris naissance ?
- Quand s’éteindra-t-il pour céder sa place au prochain ?
Ces questions, si élémentaires en apparence, nous plongent dans un vertige philosophique. Intuitivement, nous répondons : l’instant présent est « maintenant », « ici ».
- Mais où se situent alors le passé et le futur ?
- Où est cette « éternité » qui, loin d’être un temps infini, est plutôt hors du temps, et dans laquelle nous sommes déjà immergés ?
- De même, si nous nous situons sur Terre, où se trouve cette planète dans l’immensité de l’univers ?
- Si l’espace est sans fin, comment localiser un point précis, celui où nous nous tenons ?
Ces interrogations, d’une simplicité désarmante, révèlent l’improbabilité de nos réponses. Nous nous sentons comme des enfants, impuissants à articuler une pensée logique et sensée. C’est que l’instant présent ne se pense pas, il se vit. Faire l’expérience de ce questionnement est étrange, certes, mais aussi rassurant. Cela nous pousse à « mâchonner » ces questions, à en extraire toute la saveur et à nous laisser travailler de l’intérieur.
Cesser de fuir : le piège de la projection mentale
Vouloir situer mentalement l’instant présent dans une ligne temporelle est une absurdité, une fuite psychologique. C’est une projection mentale dont nous souffrons tous, consistant à échapper à la sensibilité de l’instant présent, à ce qui est là, maintenant. Nous nous évadons par la pensée en imaginant un « avant », un « après » ou un « ailleurs » – des concepts que nous venons de constater comme étant inlocalisables.
Cette fuite naît souvent de la peur de l’ennui, de la crainte de mourir dans le vide d’un instant pas assez intense, pas assez « bien » pour nous. Alors, nous construisons une autre réalité que nous espérons, que nous attendons, nous échafaudons des plans sur la comète. Cependant, cette « autre réalité meilleure » qui viendrait « après » est une fiction. Elle n’existe pas (encore). Cette fuite est vaine et nous coupe de nos ressources vitales et des solutions aux difficultés que nous rencontrons. Ces solutions se trouvent précisément maintenant, dans l’instant présent.
Cette pensée, plaquée sur l’expérience directe, est une source majeure de pertes d’énergie. Ne serait-il pas plus raisonnable de se laisser trouver par « maintenant », au lieu de « passer son temps » à chercher « après » ou à regretter « avant » ?
L’impossibilité de quitter l’instant présent : une révélation
Poursuivons notre exploration par une petite expérience : essayez, ne serait-ce qu’une seconde, de ne pas être présent à l’instant présent. Essayez maintenant. Ou plus tard, si vous préférez. Mais quand vous essaierez, ce sera forcément « maintenant ».
Vous constatez alors que vous ne pouvez pas vous échapper de l’instant présent. Même lorsque vous rêvez à autre chose, vous y rêvez maintenant. Même lorsque vous pensez à autre chose, vous y êtes encore.
Nous le constatons ensemble : vous êtes forcément toujours dans l’instant présent. On ne peut pas plus quitter l’instant présent qu’être ailleurs que là où nous sommes maintenant.
De la présence à l’attention : Être attentif à ce qui est là
La question n’est donc pas « comment être présent » (puisque nous ne pouvons pas ne pas l’être), mais plutôt « comment être attentif à ce qui est là », au lieu de partir (nulle part) avec nos pensées. La pensée est souvent une sorte d’anesthésie de l’expérience immédiate, le siège de notre vitalité.
Alors, le « truc », ce serait de ne pas penser ? Mais c’est impossible pour la plupart d’entre nous, et même si cela l’était, ce serait rare et de courte durée. Des pensées surgissent sans cesse, et ce n’est pas grave.
Pourquoi voudrions-nous que cela change ? Il n’est pas nécessaire d’attendre un état de réalisation ultérieur, où les pensées auraient enfin cessé, pour simplement apprécier ce qui est là : être présent à l’instant présent, tout en laissant le processus naturel de la pensée et des événements divers, extérieurs comme intérieurs, se dérouler.
Il s’agit de s’enraciner dans les sensations corporelles, d’y être attentif, au lieu de s’évader dans sa tête. Pour cela, des moyens simples et naturels existent :
- Se connecter à la beauté extérieure : Que ce soit face à un paysage grandiose ou en regardant une vidéo d’animaux, la beauté a le pouvoir de nous couper le souffle, de suspendre les pensées et de nous faire vibrer intensément au sein du silence. Elle nous met en résonance avec la beauté intérieure que nous sommes.
- Prendre appui sur les sensations physiques : Asseyez-vous dans votre corps, prenez place au sein de vos sensations corporelles tout en écoutant les pensées. Observez comme les sensations et les pensées sont fugaces, se transforment, passent comme des nuages. Au milieu de ce mouvement perpétuel, il y a un point fixe : « vous ». Vous, qui observez et vivez l’expérience d’être là. Lorsque vous dirigez votre attention vers ce « vous » qui perçoit l’instant présent, vous y êtes pleinement.
- Écouter votre respiration : Ce rythme relie l’extérieur à l’intérieur, ce fil ténu vous met en contact avec deux infinis. En restant tranquille, vous devenez l’instant présent qui respire, sans rien à dire, juste l’écoute. Si l’attention s’évade, il est toujours possible d’y revenir, simplement en prêtant attention au souffle.
- Observer la nature sans commentaires : Regardez, simplement. Sans jugement, sans analyse. Laissez-vous imprégner par ce qui est.
Le sourire de l’instant présent et le pouvoir du moment présent
Être présent à l’instant présent, c’est apprécier ce qui est là, tranquillement, sans commentaires, ou en écoutant ses commentaires intérieurs comme s’ils venaient de l’extérieur. Vous êtes là, ni bien ni mal, juste là… et souvent, cela s’avère être plutôt bien, sans même avoir besoin de se poser la question.
Le sourire n’est pas une condition préalable au bien-être.
- Plutôt que de chercher à induire un état, et si vous vous laissiez la chance que la joie survienne d’elle-même ?
- Qui a dit qu’il fallait sourire pour être heureux ?
- Ne serait-ce pas plutôt d’être heureux qui fait sourire ?
De plus en plus de personnes se tournent vers la méditation, la pleine conscience, le yoga… Ces pratiques sont excellentes. L’essentiel est de développer cet état de présence et d’écoute disponible, car c’est là que tout se joue. Dans le coaching et les formations au leadership, l’attention à l’instant présent est un pilier fondamental.
L’instant présent n’est pas qu’un simple contenant de vos expériences. Quand vous ouvrez simplement les yeux et découvrez ce qu’il y a à voir, avant la moindre pensée, vous n’êtes que regard, vous êtes la conscience de ce qui est là. Vous êtes à la fois le sujet, le regard qui voit, et les choses vues par ce regard. C’est vous-même qui êtes l’instant présent. Il est plus profond que les événements qui s’y produisent. La vigilance, c’est la conscience sans la pensée.
L’alignement sur le moment présent empêche le processus mental de distanciation, le bavardage intérieur. La concentration sur un seul point, l’instant présent, offre une opportunité d’explosion de plénitude et de Présence à soi-même et aux autres (paix et joie intérieures).
Le changement est possible « maintenant », sans attendre et sans effort. On ne sera jamais heureux dans le futur. Quand le bonheur sera là, ce sera forcément le présent. Il est donc essentiel d’être heureux maintenant. L’action naît de la contemplation, comme l’appétit vient de la sensation de faim.
Maintenir le « maintenant » et dire adieu à la procrastination
Pourquoi ne pas vous accorder des moments de plaisir en vivant l’instant présent ? Le plaisir, comme toute chose, peut finir par lasser, et la vie ne se réduit pas au plaisir. Cependant, vous pouvez envisager la vie comme un vaste terrain de jeu, accueillant le plaisir et le déplaisir avec appétit. Cette perspective booste l’énergie et procure un flux vital considérable, nécessaire pour embrasser l’intensité de l’expérience.
Beaucoup s’agitent en préparant une multitude de choses « maintenant » pour être bien « plus tard ». Mais quand ce « plus tard » arrive, ils sont souvent pris par la compulsion de « faire, faire, faire », préparant encore d’autres choses pour un plaisir ou un repos futur. Ils ne s’arrêtent jamais, ne profitent jamais, pris au piège des obligations. Nous sommes tous concernés. Mais la bonne nouvelle, c’est que ce n’est pas une fatalité.
Exit la procrastination ! « Ne reporte pas au lendemain ce que tu peux faire aujourd’hui. » Ce que nous reportons est souvent ce qui nous pèse, ce qui est compliqué, ce que nous n’osons pas faire par peur des conséquences. Combien de fois avons-nous expérimenté que la période la plus difficile, la plus énergivore, est celle où nous reportons sans cesse une tâche ?
Certes, certaines actions sont plus opportunes à certains moments. Cependant, il est toujours possible, ici et maintenant, d’utiliser le passé et d’influencer positivement l’avenir en étant délibérément disponible dans le présent :
- Préparer l’avenir en l’orientant positivement maintenant par les actes, les paroles et la pensée.
- Éclairer le présent en tirant positivement les leçons du passé, lui donnant ainsi du sens.
Pas de « petits » instants : chaque moment est central
Vu sous cet angle, il n’y a pas d’instants « mineurs ». Chaque instant est le centre de l’expérience à vivre, maintenant. Il n’est donc jamais trop tard, jamais besoin de renoncer, ni de procrastiner. De manière pragmatique, nous pouvons choisir quelle action privilégier en comprenant ce à quoi chaque situation nous invite en priorité.
On peut « raisonnablement » planifier une action délicate pour un moment où nous serons plus lucides ou en meilleure forme. Être responsable, c’est accepter les choses telles qu’elles se présentent et faire avec, plutôt que de vouloir faire « sans » elles ou « contre » elles. Loin de toute résignation ou fatalisme, c’est du pragmatisme. En acceptant les choses telles qu’elles sont, nous avons l’opportunité d’entrer en relation avec elles, de les influencer et de les changer.