Le sens du sacré, c’est cette capacité rare et précieuse de reconnaître une dimension de la réalité qui nous dépasse, nous élève, nous met face à l’incommensurable. Il ne s’agit pas d’un savoir, mais d’une disposition intérieure, d’un regard. Ce regard distingue — ou plutôt transfigure — le profane et le sacré, non pas comme deux mondes séparés, mais comme deux façons de percevoir une seule et même réalité.

Du latin sacer, « ce qui est inviolable », le sacré désigne ce devant quoi l’on s’incline, ce que l’on ne manipule pas. Il évoque une présence, un mystère, une profondeur que l’on ressent devant l’immensité d’un paysage, la complexité d’une œuvre, la mort d’un proche… ou même, pourquoi pas, en triant ses déchets ou en se levant difficilement le matin.

Dans une vision non-duelle du monde, tout est potentiellement sacré. C’est le regard que nous portons sur les choses qui sacralise ou profane. Ce n’est pas l’objet qui est sacré en soi, mais la conscience que nous lui accordons.

« Tout est sacré. Pas seulement la prière, le rituel ou l’atelier. Aussi : faire sa toilette, déboucher un évier, rater un bus, ou essuyer une larme. »

Les caractéristiques de l’expérience du sacré

Et pourtant, ce n’est pas forcément religieux. On peut vivre une expérience du sacré en écoutant de la musique, en regardant un enfant dormir, en travaillant dans le silence ou en créant un cercle de présence entre quelques amis.

Exemples parmi d’autres

Dans la nature : Cette sensation d’écrasement devant un ciel étoilé par une nuit claire, où l’infinité de l’espace nous fait mesurer notre insignifiance cosmique. Ou l’émotion saisie face à un arbre millénaire – ce chêne qui était là avant nous et sera là après, témoin silencieux du passage des générations. L’océan aussi, avec sa puissance indifférente, ses rythmes qui nous précèdent de millions d’années.

Dans l’art : Écouter la Passion selon Saint-Matthieu de Bach et sentir quelque chose se déchirer en nous, une beauté qui dépasse ce qu’on pensait possible. Ou se tenir devant les Nymphéas de Monet et avoir l’impression que la peinture révèle un secret du monde invisible. Ces moments où l’œuvre nous traverse plus qu’on ne la regarde.

Dans les relations humaines : Le visage d’un nouveau-né qui vient de naître – cette fragilité absolue, cette vie qui commence, ce mystère de la conscience qui s’éveille. Ou le moment où on assiste aux derniers instants d’un mourant, cette frontière mystérieuse entre être et ne plus être. L’amour maternel aussi peut toucher au sacré par son caractère inconditionnel.

Dans les objets et lieux : Une lettre manuscrite d’un grand-père disparu, qui devient intouchable. Les pierres de Jérusalem, usées par des millions de pas et de prières. Un violon de maître qui a traversé les siècles. Ces objets dépassent leur matérialité pour devenir dépositaires d’une mémoire, d’une âme collective.

Dans l’expérience du temps : Visiter Pompéi et toucher ces murs où des mains humaines ont laissé leurs traces il y a deux mille ans. Cette vertige du temps qui nous relie à l’humanité dans son ensemble. Ou contempler les peintures de Lascaux – ces premiers gestes artistiques de nos ancêtres.

Le sacré profane moderne : Curieusement, notre époque déplace parfois le sacré : certains voient dans la démocratie, les droits humains, ou même dans la science une dimension sacrée. Le respect absolu qu’inspire la « dignité humaine » relève de cette logique.

Le sacré se reconnaît à ceci : on ne peut pas le consommer, le posséder complètement, l’épuiser par l’analyse. Il garde toujours une part de mystère qui nous tient en respect.

Sacraliser le quotidien : un choix conscient

Dans nos sociétés modernes, tout devient analysable, mesurable, consommable. Le sacré semble avoir déserté les lieux publics, remplacé par des codes-barres. Mais en réalité, il se déplace. Il migre vers les marges : un geste attentionné, un moment de silence, un regard profond. Le sacré n’a pas disparu, il attend d’être reconnu.

Sacraliser son quotidien, ce n’est pas « ajouter du mystique », c’est changer de posture intérieure. On ne médite pas pour « atteindre un objectif spirituel », mais pour se rendre présent. On ne vit pas pour optimiser, mais pour honorer.

Prenons un exemple concret :
Selon une étude de l’Université de Californie à Berkeley (Keltner et Haidt, 2003), les expériences d’émerveillement (qu’on peut rapprocher du sentiment du sacré) réduisent le narcissisme, augmentent la coopération et la générosité.
Le sacré n’est donc pas seulement une expérience intérieure, il transforme notre façon d’être au monde.

Pourquoi tant de résistance ?

L’épisode biblique du « jeune homme riche » (Marc 10:17-31) illustre parfaitement cette tension : nous voulons la vie éternelle sans renoncer à nos sécurités. Nous cherchons la transcendance, mais refusons de quitter nos « grands biens », c’est-à-dire nos attachements, nos illusions, nos identités de façade. Or, le sacré ne cohabite pas avec le marchandage. Il exige l’absolu.

Et pourtant, paradoxalement, il ne nous demande rien — sinon d’ouvrir les yeux.

Développer le sens du sacré : pistes concrètes

Le sacré est une décision

Le sacré n’est pas un lieu, ni une croyance, ni une pratique. C’est une décision intérieure, un choix existentiel :
Vivre dans un monde plat et explicable, ou dans un monde habité, vibrant, mystérieux.

« Vous êtes intelligent : voyez cela clairement, soyez heureux, et vivez dans le sacré partout où vous êtes. »

Parce que c’est votre présence qui sacralise. Pas l’encens, ni les mots, ni les lieux. Mais la qualité de votre regard :

De même qu’on peut être prisonnier d’un palais ou bien libre au sein même d’une prison, on peut profaner un lieu dit sacré, ou sanctifier un lieu ordinaire, en fonction du regard qu’on porte sur lui et la manière de s’y comporter !

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Paul

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